Dimanche 1 mars 7 01 /03 /Mars 13:29

Edmond se sentait totalement désorienté. S’il reconnaissait bien l’endroit où il se trouvait, une longue plage de sable fin, quelque chose, sans qu’il puisse dire quoi, le mettait mal à l’aise, quelque chose qui ne cadrait pas avec sa situation. Il avançait à pas lents, en bordure de plage ; les vagues venaient mourir à ses pieds. Une légère brise soufflant de l’Est lui caressait agréablement le visage et le soleil semblait enfin vouloir prendre le dessus sur les nuages. Mais que faisait-il là ? Comment y était-il venu ? Il avait beau chercher au plus profond de sa mémoire, il ne trouvait pas de réponse et c’était cela le détail qui ne cadrait pas. La veille, il était encore dans une cellule, derrière les hauts murs de la prison de Caen ; aujourd’hui, il se trouvait sur la plage de son enfance ; entre les deux, il n’y avait qu’un immense trou noir. Il décida de s’arrêter un instant pour tenter de recouvrer tous ses esprits. Il s’assit sur le sable et plongea son regard vers la mer, bien au-delà de la ligne d’horizon ; il était tellement pris dans ses réflexions, qu’il ne se rendit pas compte qu’une jeune femme s’installait auprès de lui. Elle avait de longs cheveux blonds, doux comme de la soie ; ils voletaient avec grâce, sous l’effet de la brise. Ses yeux couleur émeraude brillaient légèrement et sur ses joues roulaient quelques larmes. Elle appuya sa tête contre son épaule et ce fut à cet instant qu’il prit conscience de sa présence.

 

-   Claire ? s’exclama-t-il. Comment… que fais-tu ici ?

 

Complètement hébété, il prit la jeune femme dans ses bras ; c’était si bon de pouvoir la serrer à nouveau contre lui ; cela faisait si longtemps. Il se mit à pleurer de joie.

 

Claire et Edmond s’étaient mariés à Caen, trois ans avant le début du conflit. A l’époque, il était menuisier chez un artisan de la ville. Après le mariage, il eut des projets d’avenir plein la tête : se mettre à son compte, acheter une petite maison hors de Caen, avoir des enfants… Mais tout s’était écroulé le 3 septembre 1939, lorsque la France et l’Angleterre,, suite à l’invasion de la Pologne, avaient déclaré la guerre à l’Allemagne nazie.

 

Edmond fut mobilisé quelques jours après déclaration de guerre. Même si les au-revoir furent un véritable déchirement pour le couple, il était confiant, croyant fermement, comme tous les soldats français partant au combat, que cette guerre se terminerait très vite : les allemands allaient se briser les dents contre la ligne Maginot.

 

-   Je vais revenir très bientôt ! avait-il crié alors que le train s’était élancé sur la voie.

 

Les allemands ne se brisèrent pas les dents sur la ligne Maginot. Français et anglais durent vite battre en retraite, cédant irrémédiablement du terrain aux nazis implacables. Aux environs de Paris, Edmond et son unité furent fait prisonnier et internés dans un camp provisoire. Trois mois plus tard, suite à un concours de circonstances en sa faveur, Edmond arriva à s’évader avec trois compagnons d’arme. Un fermier des environs les hébergea quelques jours, leur fournissant des vêtements civils, puis Edmond partit seul pour regagner la Normandie et sa femme.

 

Il passa quelques mois à ruminer sa rancœur contre le Maréchal et le gouvernement de Vichy qui semblaient se rallier aux idées d’Hitler, déshonorant ainsi la France ; Pétain, le héros de la première guerre, tournait le dos à son peuple. Puis il entendit parler d’un réseau de résistance qui s’était formé aux environs de Caen. A force de patience et de ténacité, il finit par trouver le bon contact et intégra le réseau ; cinq mois plus tard, la gestapo l’attendait en bas de chez lui pour le conduire à la maison d’arrêt de Caen.

 

Edmond remarqua les larmes qui roulaient sur les joues de Claire ; son cœur se serra brusquement ; une idée venait de lui traverser l’esprit, trop rapide pour qu’il en saisisse le sens, mais assez noire pour lui faire mal et peur.

 

-   Que se passe-t-il, ma chérie ?

 

D’un geste de la main, Claire lui fit signe de se taire.

 

-   Nous n’avons pas le temps de parler, murmura-t-elle. Nous n’avons plus le temps !

 

Il y avait des sanglots dans sa voix et Edmond essaya en vain de comprendre le sens de ses paroles. Claire approcha son visage du sien et leurs lèvres se scellèrent ; il avait presque oublié le goût suave de sa bouche. Il promena ses mains dans la longue chevelure soyeuse et se rendit compte, sans savoir pourquoi, que lui aussi s’était mis à pleurer.

 

Elle le fit s’allonger sur le sable ; son regard était magnifié par le combat de deux sentiments forts : l’amour intense qu’elle lui vouait et une profonde tristesse. Lentement, elle défit les boutons de la chemise de son mari et promena ses mains sur le torse velu et musclé, provoquant des frissons dans tout le corps d’Edmond. Elle-même, sentait le désir monter dans ses entrailles.

 

Il ferma les yeux lorsque sa femme commença à le couvrir de petits baisers ; il s’abandonna totalement à ses caresses, à cette douceur si bienvenue, après de longs mois de torture. Claire détacha la ceinture du pantalon, ouvrit la braguette et libéra la verge déjà bien tendu. Elle resta un instant sans rien faire, juste à la regarder, à la sentir puissante dans sa main, puis elle titilla le gland de la pointe de sa langue, faisant tressauter la verge et arrachant de longs soupirs à son mari. Enfin, elle se leva, troussa sa jupe, retira sa culotte et se plaça au-dessus de lui. Lentement, elle aspira la verge dans son antre humide, fermant à son tour les yeux.

 

Edmond sentit une chaleur bienfaisante se répandre dans tout son être ; Claire s’agitait de plus en plus vite sur son sexe et son excitation monta d’un cran en entendant les gémissements de sa femme. Il savait qu’il ne résisterait pas longtemps : il y avait tant de mois qu’il n’avait plus fait l’amour. Des picotements prenaient naissance au creux de son ventre et se mit à gémir, lui prenant la taille dans ses mains. Elle sut qu’il allait venir, alors elle accéléra ses coups de rein et elle fut emportée par l’orgasme au moment où le sperme de son mari frappait le fond de sa cavité.

 

-   Je t’aime ! hurla-t-elle. Rappelle-toi que je t’aimerai pour toujours !

 

Edmond la regarda, interloqué, ne comprenant pas le sens du message de sa femme.

 

 

-   Debout ! cria une voix d’homme.

 

Edmond se leva brusquement, ouvrant des yeux hagards. La plage, la brise, sa femme… tout avait disparu : il était à nouveau dans sa cellule, derrière les hauts murs de la prison de Caen.

 

-   Schnell !

 

Le garde allemand le menaçait de la pointe de son fusil ; il obéit à l’ordre et se retrouva dans le couloir de la prison. D’autres soldats allemands sortaient d’autres prisonniers de leurs cellules. Edmond savait qu’il était beaucoup trop tôt pour la promenade : il se passait quelque chose d’anormal.

 

Les prisonniers furent conduits à l’entrée de la cour de la prison. Edmond y aperçut dix soldats allemands, fusil à la main, alignés les uns à côté des autres. Subitement, il comprit tout : le sens du rêve qu’il venait de faire, les larmes de sa femme, ses paroles, sa propre tristesse. Aussi invraisemblable que cela puisse paraître, Claire était venue lui dire adieu dans un rêve. Dix prisonniers, dont Edmond, furent alignés dos au mur ; les soldats se positionnèrent face à eux.

 

-   Spielt in ! hurla une voix.

 

Les soldats mirent en joue. Edmond ferma les yeux ; ses pensées allèrent à sa femme ; il se rappela de ses dernières paroles : je t’aimerai pour toujours. Il souhaita qu’elle rencontre un homme bien pour l’accompagner le plus longtemps possible dans sa vie, lui donner ce qu’il n’avait pu lui offrir : une maison, des enfants… une vraie famille.

 

-   Feuer !

 

 

A quelques kilomètres de la prison, à genoux devant une représentation du Christ sur la croix, Claire termina sa prière, avant de s’effondrer en larmes. Ce jour-là, entre 10 heures et midi, 92 prisonniers furent exécutés par les allemands, sans aucune raison apparente et sans procès.

 

 

Prison de Caen, dix heures du matin, 6 juin 1944

Par laplumeoccitane46 - Publié dans : Nouvelles en vrac
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